Voilà quelques années que je suis Velvetshadow sur Twitter, d’abord pour son travail en tant que community manager et son regard très intéressant sur l’industrie du web.
– Salut Velvetshadow, peux-tu te présenter à nos lecteur ?
– Avec plaisir ! Eh bien je suis un daron de 32 ans.
– Quel a été ton parcours avant de commencer à streamer ?
– J’ai été projeté dans la vie active très tôt et après avoir multiplié les petits boulots à droite à gauche, j’ai commencé en tant que Community Manager il y a dix ans, puis j’ai évolué comme un Pokemon en Social Media Manager pour finalement me lancer à mon compte en 2016 comme Consultant en communication (spécialisé web, social media). En parallèle et durant 3 ans, je donnais des cours de Gestion des Medias Sociaux dans une grande école à Paris. Est-ce que je viens de synthétiser mon profil LinkedIn car j’ai trop peu de chose à dire ? Absolument.
– Tu es sur Twitch depuis quelques mois, comment ton aventure a-t-elle commencée ?
– A vrai dire, ça faisait longtemps que je voulais me lancer (déjà 8-9 ans !) mais à l’époque avec deux enfants en bas-âge, j’avais du mal à trouver le temps, l’énergie et le silence nécessaire pour m’y mettre sérieusement. La vie de parent est faite d’imprévus, d’interruptions constantes, si on combine avec un boulot chronophage il ne reste que très peu de temps pour le reste alors on rogne sur le sommeil… Désormais ils sont grands et j’ai trouvé une forme de rythme, à tâtons. Je me suis lancé en mai 2020, après une lourde perte d’activité côté freelance due au Covid et un réel questionnement sur mes aspirations dans la vie. C’est une combinaison entre ma passion du gaming dont je n’arrivais plus à profiter, une certaines lassitude de transformer mes heures de vie en boulot non-stop, une forme de tristesse aussi quand je répondais à ma fille « désolé, j’ai trop de boulot » quand elle voulait partager une activité avec moi car à un moment on se dit : « Merde, c’est ça l’exemple que je lui donne ? Que la vie, c’est se butter au travail pour tout juste survivre en fin de mois ? Que ça prend le pas sur tout le reste par nécessité ? ».
Pour compléter, j’adore mon job mais cette surcharge n’était pas saine ni pour ma famille, ni moralement. Et inversement quand une crise survient comme celle du Covid et que l’on perd tout pendant 5-6 mois, on se tape sur les doigts de ne pas avoir diversifié davantage son activité. Alors j’ai revu mes priorités : être plus sélectif sur mes clients, revoir mes contrats pour sécuriser des revenus même en cas d’annulation, prendre moins de missions en même temps et enfin me lancer dans le stream pour me changer les idées… Mais ce qui était un passe-temps allait avoir un impact que je n’avais pas vu venir.
– Débuter sur cette plateforme n’est pas forcément simple, aurais-tu des conseils à donner à ceux qui aimeraient se lancer ?
– Franchement : ne vous mettez pas la pression. Tout le monde peut commencer, même avec du matériel bas de gamme. Rien d’ingérable avec quelques réglages logiciels, en particulier au niveau du micro. Les gens viennent pour vous avant tout, vous pourrez toujours améliorer la qualité de votre stream par incréments sur la durée ! Contrepoint : Tout le monde peut commencer justement, trouver sa place est difficile, sortir du lot l’est encore plus. Restez passionnés·ées avant tout car pour réussir à en vivre, il va vous falloir du temps et beaucoup de travail. Une communauté ne se construit pas du jour au lendemain.
– Quel matériel et logiciels utilises-tu ? Il y a des choses indispensables selon toi ?
– Niveau matériel, en dehors d’un micro et d’une bonne connexion, rien n’est indispensable. Cependant, vous grossirez bien plus vite à partir du moment où vous mettez votre cam car ça rajoute vraiment une proximité avec vos viewers. Pour votre propre confort, je vous recommande fortement d’avoir un second écran pour monitorer votre logiciel de streaming (personnellement j’utilise OBS) pendant que vous jouez sur votre moniteur principal, ainsi que d’avoir un streamdeck ou équivalent (il en existe sur mobile notamment et certains sont gratuits). Cela vous donnera un avantage net et une réelle amélioration de confort et de fluidité au quotidien.
– Comment arrives-tu à concilier vie de famille et streaming ?
– C’est un réel challenge. Pour le moment, j’ai fixé 2 jours (mercredi et dimanche) et un horaire fixe à laquelle les enfants sont couchés (21h30 – Minuit). Ma compagne est une joueuse aussi et les soirs où je suis en live, ce sont des soirs où l’on ne joue pas ensemble. A ce jour, je ne suis pas satisfait de mon rythme car il y a des impondérables : Réveil à 7h pour les gamins puis les emmener à l’école, ensuite consulting jusqu’à 14h30, ensuite sieste jusqu’à 17h15 puis retour de l’école, vie de famille jusqu’à leur coucher vers 21h. Ca laisse 10h nocturnes de libres entre 21h et 7h du matin dans lesquelles tu dois caser : Vie de couple, gaming, streaming, administratif, gestion de la commu… Et sommeil. Sans compter le reste. Du coup, se coucher vers 2 ou 3h du matin c’est un peu mon quotidien (d’où les siestes en journée pour tenir). La semaine dernière je constatais avec effroi que mon suivi de sommeil m’indiquait une moyenne de 5h par jour en novembre, en incluant les siestes. C’est un point sur lequel je dois absolument m’améliorer car c’est avant tout le résultat d’une mauvaise gestion ! Mais au fur et à mesure que Twitch prend de la place sur les revenus, à un moment il faut faire des choix.
En 2021, voilà comment je vois les choses : Maximum deux clients et uniquement sur des missions de type CM/SMM long-terme car je peux le faire tout au long de ma journée 7h-Minuit en plus de Twitch et de ma famille. Non seulement ça me permettrait de streamer davantage et de tester de nouveaux créneaux (matinée et après-midi) pour faire grandir la communauté, d’enfin dégager un revenu stable et prévisible grâce aux missions et de le compléter avec celui de Twitch… Tout en maintenant un rythme sain et une vie familiale stable. De plus, ma guilde sur WoW compte commencer à raid à partir de Janvier. Elle aussi a un rythme atypique : La plupart des guildes partent en raid deux à trois soirs par semaine, la notre n’a qu’un soir (le mardi) et raid sans vocal, ce qui rajoute du challenge. C’est donc un nouveau créneau qui s’ouvrirait pour la chaîne, car non seulement je pourrais jouer avec ma compagne (qui est dans la même guilde) ET streamer du contenu intéressant sans avoir à gérer un vocal de guilde ce qui peut être gênant quand j’anime un live. J’ai hâte !
– Malgré une audience modeste, ta communauté semble très impliquée. Saurais-tu expliquer pourquoi ?
– C’est juste de la chance. Cette chance, c’est d’avoir une compagne compréhensive qui me soutient et qui s’intéresse à cette activité (elle a d’ailleurs même ouvert récemment sa boutique dédiée aux streamers qui recherchent des éléments graphiques pour leur chaîne. Des amis incroyables qui me suivent depuis des années, plus de 10 ans pour certains, qui n’étaient pas forcément fan de Twitch ni utilisateurs mais qui sont pourtant au RDV tous les mercredi et dimanche soirs. Une base de followers sur Twitter déjà existante qui m’apporte un peu de visibilité (je dis un peu car cette base me suivait pour autre chose à la base, les médias sociaux. Du coup ça aide, mais ça fait pas tout). Sur leur implication, je n’ai pas d’explication autre que la chance mais une chose est sûre, c’est qu’émotionnellement ça fait un bien fou. Je suis devenu papa très tôt et dans une situation très précaire, ma vie sociale s’est mise en pause pendant longtemps pour réussir à gérer tout en joignant les deux bouts. J’en parle peu, par l’habitude des années. Pourtant, ils sont toujours là. Cette communauté, le fait d’avoir ces amis proches dedans, de se sentir soutenu, c’est comme si ça avait ouvert une digue. C’est peut-être ça aussi : Le fait de partager, de rester sincère, d’accepter ses faiblesses ouvertement sans se reposer dessus. C’est un cliché, mais à vrai dire je ne sais pas comment les remercier, alors j’espère leur apporter un max de divertissement et des bons moments à chaque stream !
– L’accueil qui t’as été réservé sur la plateforme est assez exceptionnel, envisages-tu de streamer à plein temps dans un avenir proche ?
– Concernant l’accueil, c’est vrai et j’en suis conscient. C’est dingue. Et ça m’a ouvert des portes, notamment un job d’intervenant dans une école pour donner des cours de streaming/marketing à des futurs joueurs e-sport ce qui combine mes trois passions : la communication, le stream et transmettre des connaissances et de l’expérience. J’ai pas les mots, c’est un tourbillon permanent d’émotions et de reconnaissance.
Pour le fait de streamer à plein temps, il faut voir plus large : Est-ce que je vais me mettre à stream H24 ? Probablement pas, pour les raisons abordées plus haut. En revanche, est-ce que je compte vivre à 100% du streaming et des activités connexes (cours, CM pour des entreprises liées au gaming…) sur le long terme ? La réponse est oui, car c’est là où j’arrive enfin à m’épanouir. C’est du travail mais qu’est ce que j’aime ce travail, c’est incroyable ! Et si l’intention est bien là, il reste à voir comment l’intégrer au mieux dans mon quotidien familial. On peut ajouter aussi le composant incertain : Il n’y a pas de formule magique pour réussir sur Twitch, ni pour en dégager des revenus. Je me suis donné 2 ans, on verra bien ! On va continuer à proposer du contenu intéressant et divertissant et si les viewers estiment que ça mérite un Prime/Sub/Tips c’est à eux de juger, pas à moi ! Dans tous les cas je les remercie infiniment d’être là.
– Le streaming en direct est de plus en plus populaire, penses-tu que c’est un média d’avenir ?
– Oui et non… Il est plus populaire car nous avons la technologie, autant en diffuseur qu’en viewer. Vitesse de connexion, écrans de qualité, matériel performant… Quand tu vois ce qu’un smartphone peut faire c’est complètement fou. Mais il n’est pas adapté à tout… Sans compter que pour faire quelque-chose de durable, il faut beaucoup d’implication et de travail. Avec le Covid quand je me suis lancé, j’ai vu plein de nouveaux streamers faire de même et c’était génial ! Mais trois mois plus tard, il doit en rester 10% d’actifs et encore, je suis large. Le fait est que c’est une activité difficile, très exigeante en temps et en énergie, ce qui est sous-estimé au moment où l’on se lance. Sans compter que les résultats se font sur le moyen-long terme et que les streams avec 3 viewers peuvent décourager !
– Quel genre de gamer es-tu ? Quels sont tes genres de prédilection ?
– Aucune idée ! J’aime jouer à tout. Découvrir des univers, des ambiances, des scènes… Parfois calmes, parfois nerveuses. J’aime tous les types de jeux, on peut pas dire que je suis difficile ! Mais oui, j’ai un faible pour les MMORPG (WoW, GW, FFXIV…) et les jeux d’aventure solo (Tomb Raider, The Witcher, et maintenant Cyberpunk 2077).
– Quelque chose à rajouter ? Des projets à venir ?
– De nombreux projets pour la chaîne mais je ne peux rien dévoiler pour l’instant car j’essaye encore de stabiliser tout ça et de m’entourer de gens qui ont des compétences complémentaires pour m’accompagner ! La vie m’a appris à ne jamais faire de plans sur la comète sous peine de douiller si jamais on doit les abandonner.
– Question bonus : C’est quoi un bon streamer ?
– Vous savez, je ne pense pas qu’il y ait de bons ou de mauvais streamers. C’est avant tout des rencontres.