Si vous utilisez Twitter, vous avez très probablement déjà vu ces comptes qui se font passer pour des jeunes femmes qui publient des photos dénudées ou qui retweet des contenus pornographiques. Bien entendu, ces profils ne sont pas réels et affichent soit des photos volées soit des clichés achetés sur des sites bon marché pour adultes.
Les utilisateurs avertis reconnaissent au premier coup d’œil ces fakes mais il est parfois étonnant de voir ces comptes avec des milliers de followers (dont une partie a été achetée des sites obscures) et de nombreuses personnes qui interagissent avec les Tweets qu’ils peuvent publier. Tout le monde ne semble donc pas être très au fait de ces pratiques douteuses et on souhaitait vous en parler après avoir examiné en profondeur ces profils pendant plusieurs semaines.
Pourquoi ils me suivent ?
La première chose que nous avons tenté de comprendre, c’est comment ils fonctionnaient. Nous n’aurons pas mis longtemps pour en déduire la manière de procéder. Si vous suivez quelques comptes adultes et notamment des comptes populaires dans le domaine du porno, par exemple, ces fakes utilisent alors leurs followers comme une gigantesque base de données de personnes qui peuvent, potentiellement, être intéressées par le sexe ou le porno. La technique du « mass following » est ensuite mise en œuvre. Un concept marketing qui consiste à suivre le maximum d’utilisateurs dans l’espoir d’être suivi à son tour. Un système bien rodé et qui fonctionne. De nombreux comptes de marques se servent du « mass following » pour accroître leur audience. En suivant un petit millier de profils, vous pouvez espérer gagner une centaine de followers. Il s’agit là d’une technique de growth hacking éprouvée. Ajoutez à cela l’industrialisation des ces pratiques et la créations de multiples faux comptes et vous obtiendrez un savoureux mélange de mauvaises techniques qui commencent sérieusement à devenir problématique.
A quoi servent ces comptes ?
Inutile de tourner autour du pot, ces comptes n’existent que pour faire la promotion de services adultes en ligne. Après avoir accumulé bon nombre de followers engagés, les clichés dénudés laissent rapidement place à des liens d’affiliation qui permettent aux créateurs de ces faux profils de générer quelques revenus substantiels. Si ces sponsors ont, officiellement, des règles qui interdisent ce genre de pratiques, sur le terrain, il semblerait bien qu’ils ferment plutôt les yeux. Il n’est pourtant pas bien compliqué de remonter à la source grâce aux ID de tracking que nous offrent les liens d’affiliation publiés. A en croire la répétitivité de la méthode, on s’interroge même sur le fait qu’il pourrait s’agir des régies elles-mêmes qui polluent ce réseau social. Se cachant derrière un affilié zélé qui pourrait tout simplement ne pas exister. Difficile de le savoir tant ces plateformes qui fournissent ces liens d’affiliation sont assez opaque sur ces questions.
Le cœur du problème
On pourrait se dire qu’il suffit de bloquer ces comptes ou de ne pas y faire attention. S’il faut effectivement bloquer et signaler systématiquement ces fakes, le fait est qu’ils perdurent et Twitter a bien du mal à faire le ménage. La première chose qui est gênante, c’est au niveau des photos publiées. Si nous n’avons pas pu remonter jusqu’à leur source, il y a fort à parier qu’il s’agit de photos volées ou des contenus achetés sur une plateforme qui vend ce genre de contenus pour les webmasters. Un marché qui va chercher ses modèles dans les pays de l’est afin de proposer des tarifs toujours plus bas. Si effectivement les licences de ces photos permettent d’en faire ce que l’on veut, c’est du côté éthique qu’il faudra regarder. Pas certains que ces jeunes femmes aient signé pour devenir « Julie la cochonne qui cherche des belles bites ».
Une chose est certaine, il n’y a pas de femmes derrière ce business. Il suffit de lire leurs Tweets ou les biographies de ces comptes pour réaliser que nous sommes face à des personnes qui ne semblent pas avoir beaucoup de respect pour elles. Si on peut discuter des techniques marketing, concernant cet affligeant machisme nauséabond, il n’y a pas d’argument possible en leur faveur.
Le secteur de l’adulte a beaucoup de problèmes avec la censure et le spamming et ce genre de fakes sont souvent une bonne raison pour les réseaux sociaux de fermer les vannes. C’est typiquement à cause des ressources nécessaires pour faire le ménage que bon nombre de sites décident d’interdire le sexe sur leurs plateformes. Ce spam coûte cher aux entreprises et ne fait qu’apporter du grain à moudre pour les anti-porn. Ajoutons à cela que les sites qui profitent de cette « promotion gratuite » sont souvent des services discutables, à la limite de l’arnaque. Le genre de business qui refroidit considérablement les organismes de paiement qui considèrent, à juste titre, que ces transactions sont « à risque ».
Phénomène français
Si cette manière de faire existe à peu près partout dans le monde, il faut bien avouer que ces spambots sont légions en France. D’après nos analyses, il n’y a pas l’air d’y avoir beaucoup de sociétés derrière ces comptes. Le gros du phénomène semble être lié à quelques entités. Si nous n’avons pas pu remonter jusqu’à elles, nous avons de grosses suspicions mais il ne serait pas raisonnable de les publier ici sans preuve tangible. Le fait est que ces fakes sont pensés pour une audience francophone et demandent probablement quelques ressources pour les mettre en œuvre. La plupart de ces comptes semblent être bien animés par des Humains, tout ne semble pas automatisé. C’est beaucoup de temps et d’argent pour ce petit commerce qui doit être relativement lucratif puisqu’il perdure depuis de longues années.
Un business qui doit surtout profiter aux plateformes qui proposent des bots, des systèmes automatisés de following et les vendeurs de followers.
Que faire ?
Comme souligné plus haut, il ne faut pas hésiter à bloquer et signaler systématiquement ces comptes dès que vous en voyez un. Il n’y a malheureusement pas grand chose d’autre à faire tant que Twitter n’aura pas les moyens de lutter contre cette forme de spamming. Au delà de la malhonnêteté intellectuelle que sont ces fakes, ils participent grandement à la mauvaise réputation des services adultes en ligne et en aucun cas ils pourraient être positifs pour ce secteur qui souffre déjà beaucoup de la censure et d’une image qui ne reflète pas forcément la réalité.
On aurait tord de penser que c’est une bonne pratique car il est assez peu probable que cela génère des revenus confortables. Un business qui, finalement, fait plus de mal que de bien à toute l’industrie.