Dans les années 80, le jeu vidéo était un média de niche. Souvent associé à l’enfance et assimilé aux jouets, le gaming était loin de convaincre tout le monde. Il faudra probablement attendre le milieu des années 90 avec la démocratisation des ordinateurs personnels mais aussi des consoles telles que la PlayStation pour que les regards changent.
Des débuts dans la distribution
C’est justement dans le milieu des années 90 que CD Projekt a commencé à faire des affaire. Trouver des jeux sur CD-Rom et particulièrement en Pologne n’était pas une mince affaire. Marcin Iwiński et Michał Kiciński auront alors trouvé là un marché en devenir et se lanceront dans l’édition de logiciel mais surtout de jeux.
C’est notamment grâce à eux que nous avons pu avoir le premier Baldur’s Gate, un jeu de rôle en pointer-et-cliquer en deux dimensions en 1998 ou encore Planescape: Torment, un an plus tard, qui lui aussi se déroule dans l’univers de Donjons et Dragons. En 2000, c’est le jeu Icewind Dale qui sera également distribué par CD Projekt dans toute l’Europe.
Autant dire que leur amour pour le médiéval-fantastique ne date pas d’hier. C’est donc en toute logique qu’ils lancent le premier studio de développement en 2002 qui accouchera du premier opus de The Witcher. Un titre qui restera relativement confidentiel mais qui aura tout de même un certain succès d’estime.
L’entreprise poursuit sa croissance avec quelques rachats dont le plus notable étant GOG.com en 2008. Une plateforme de téléchargement de jeux sans DRM dont certains sont également disponibles sous Linux. À un moment où Steam était déjà très bien installé, il faut bien avouer que c’était courageux. En fin de compte, c’était une certaine suite logique. CD Projekt voulait continuer à distribuer des jeux mais cette fois-ci, en dématérialisé.
Des suites pour The Witcher
S’en suit la sortie de The Witcher 2 en 2011 qui profitera d’une petite hype de la part des joueurs qui avaient apprécié le premier. On ne peut pas parler d’un gigantesque succès mais le jeu est rentable et la franchise commence à prendre. Il faut dire que nos amis polonais savent écrire de belles histoires très prenantes…
L’année suivante, CD Projekt annonce à l’E3 le début du développement d’une nouvelle franchise : Cyberpunk 2077. Un premier trailer d’intention y est montré et les joueurs sont immédiatement emballés. La promesse est belle mais il faudra se montrer extrêmement patient puisque le jeu ne sortira que 9 ans plus tard. J’y reviendrai.
L’entreprise est maintenant bien installée, de nombreux projets sont en préparation et leur plateforme de téléchargement commencent à se faire une réputation. Tout va bien dans le meilleur des monde ! CD Projekt enfoncera le clou en 2015 avec l’incroyable The Witcher 3. Le titre reste, encore aujourd’hui, une expérience très inédite avec un open world très cohérent, une histoire qui a marqué de nombreux joueurs et surtout des personnages particulièrement bien écrits et plutôt fidèle aux romans de Andrzej Sapkowski. Un auteur que l’on appel même le Tolkien Polonais.
Le titre profitera par la suite de deux gros DLC qui apporteront beaucoup au jeu et finiront de corriger les bugs qui étaient encore présents. Des bugs que l’on a bien oublié aujourd’hui. Il faut dire qu’offrir un titre parfait et de cet envergure n’est pas un exercice aisé. The Witcher 3 aura même le droit à une version remasterisée en 2022 qui lui permet d’être toujours aussi populaire de nos jours. Une belle réussite.
Cybercatastrophe ?
CD Projekt aura eu cette capacité à marquer les joueurs mais aussi mettre la barre assez haute pour l’industrie. Avec Cyberpunk 2077 sorti en 2020, ils vont aussi faire beaucoup parler d’eux mais pas forcément pour de bonnes raisons. Le jeu est très attendu et on se souvent avec émotion de l’arrivée de Keanu Reeves sur la scène de l’E3. Un spectacle d’envergure qui en dévoilera un peu plus sur ce qui s’annonce comme une petite révolution vidéoludique. Enfin… Sur le papier…
À sa sortie, c’est la douche froide pour de nombreux joueurs console. Sur Xbox One et PlayStation 4, le jeu est bugué et pas du tout à la hauteur des attentes. Les graphismes ont subit un gros downgrade, l’open world est tristement vide et le soft accuse de très nombreux plantage. Pratiquement injouable. Sur PC, l’expérience est bien meilleure même s’il reste des petites choses à corriger ici et là. C’est d’ailleurs sur cette plateforme que j’aurais ma première expérience sur Cyberpunk 2077. J’ai immédiatement été conquis.
Cette affaire aura fait pas mal de tapage médiatique. Entre la presse qui n’avait pas reçu ces versions consoles avant le lancement, les mensonges de l’entreprise et la découverte d’un management problématique dans leurs studio, l’image de CD Projekt en aura pris un coup. À tel point que l’industrie toute entière du jeu vidéo reverra sa copie. Si aujourd’hui les sorties décalées sont devenues courantes, c’est un peu à cause ou grâce à CD Projekt. Aucune entreprise ne veut répéter un tel fiasco.
J’en avais déjà parlé mais la pression économique qui pèsent sur les gros studios n’est pas étrangère à cet évènement. Les investisseurs veulent leur argent rapidement en oubliant que l’on parle d’une œuvre artistique. Les titres qui sortent dans la précipitation ne sont pas toujours à la hauteur. Cyberpunk 2077 aura tout de même réussi ce tour de force. Remettre en question la manière dont sont traités les studios et surtout l’intérêt de proposer aux joueurs des titres qualitatifs tant l’exigence a augmenté ces dernières années.
CD Red Redemption
CD Projekt rattrapera le coup en proposant une version « nextgen » bien plus belle et plus fidèle aux promesses qui avaient été faites en 2012. Si on exclue les versions des consoles de la génération précédente, Cyberpunk 2077 offre désormais une expérience incroyable. On est immergé dans cet univers futuriste et on nous y raconte des histoires très bien écrites. Selon moi, c’est là où brille le plus CD Projekt. On sent qu’un soin particulier est apporté à la narration. Ils savent s’entourer d’auteurs brillants comme c’était le cas avec The Witcher.
Si vous me suivez depuis longtemps, vous savez à quel point j’aime ce genre et Cyberpunk 2077 aura été une de mes plus belles expériences vidéo ludique de ces 10 dernières années. Rien que ça. C’est très personnel mais l’histoire de V m’aura vraiment touché. Financièrement CD Projekt se porte bien. De nouveaux projets sont dans les cartons notamment un jeu dans l’univers de The Witcher qui sera développé sous Unreal Engine. Un choix qui leur évitera probablement de rencontrer les mêmes déboires techniques qu’avec Cyberpunk 2077.
Même si la confiance n’est pas au plus haut, on peut tout de même espérer de belles choses de leur part. Quoi qu’il arrive, CD Projekt aura compté dans l’industrie du jeu vidéo. Bousculant nos habitudes de joueurs. L’entreprise est toujours debout et on espère qu’elle aura su apprendre de ses erreurs pour nous proposer des jeux encore plus magiques.